Systèmes de culture

Systèmes de culture

Concevoir et évaluer de nouveaux systèmes de culture agroécologiques, multi-performants, durables, à forte rupture d’utilisation des pesticides

Coordinateur : Nathalie Moutier

Programme mené en collaboration entre les équipes MVI, EGI, RD, MIR, RCA et PMB de l’IGEPP ; les UEs La Motte (Le Rheu) et RGCO (Ploudaniel) ; l’UMR SAS 

Contexte

Depuis 60 ans, on assiste à une simplification des systèmes de cultures : les principales cultures s’enchaînent selon des rotations de plus en plus courtes sur des parcelles de plus en plus grandes. Les risques associés sont une faible robustesse économique en cas de problème sur ces cultures, le développement des bioagresseurs aériens et telluriques, et une spécialisation de la flore adventice. Beaucoup de ces bioagresseurs sont gérés par le recours à des produits phytosanitaires de synthèse. Cette utilisation intensive des intrants chimiques a un impact très négatif sur la santé humaine et l’environnement et peut aboutir à des impasses techniques quand des résistances apparaissent ou des molécules sont retirées du marché.

Aujourd’hui, la demande de la société et des acteurs des filières tend vers une production locale, durable et saine. Les orientations européennes (Green Deal, stratégie Farm to Fork) et nationales (Plan Ecophyto II+, Loi Egalim et Plan Ambition Bio) visent le développement de pratiques agroécologiques avec une réduction de 50% des pesticides d’ici 2025 et le développement de l’agriculture biologique (15% de la SAU française en 2022, 25% de la SAU européenne en 2030), la diversification des cultures et des systèmes ainsi qu’une meilleure autonomie protéique.

Il est donc indispensable de :

  • mener une réflexion sur les systèmes de culture futurs et de définir les nouveaux besoins en matière de cultures en rotation, de gestion des inter-cultures, de variétés et d’itinéraires techniques adaptés à ces nouveaux systèmes
  • développer et combiner les leviers agroécologiques permettant de gérer, chacun partiellement, la protection des cultures
  • concevoir, construire puis évaluer ces systèmes de cultures innovants, capables de répondre à des enjeux environnementaux, sociaux et économiques, dans des dispositifs multi-sites.

Objectifs

Les expérimentations systémiques menées dans l’UMR IGEPP depuis 2018 sont basées sur des systèmes de polyculture (grandes cultures et légumes) du Grand Ouest de la France en agriculture biologique (AB) et en agriculture conventionnelle (AC), support d’épandage et producteurs de matières premières pour l’élevage (paille, maïs, associations céréales-légumineuses). Nous avons mis en place trois systèmes de culture à fortes contraintes de réduction de pesticides (entre 75% et 100% de réduction de l’IFT) et d’engrais azotés d’origine minérale (entre 75% et 100% de réduction) par rapport aux situations de référence choisies. Les deux systèmes en AC, sur le site du Rheu, se différencient par le niveau de recours au travail du sol (labour vs travail du sol alternatif). Le troisième système est conduit en AB à Ploudaniel.

Dans ces essais « BioDiverSystem », nous émettons l’hypothèse qu’il est possible d’optimiser les services rendus par la biodiversité sauvage et cultivée pour :

  • perturber le comportement des bioagresseurs et pour améliorer l'efficacité de leur contrôle afin de fortement diminuer, voire de supprimer, le recours aux pesticides
  • réduire l’usage des engrais par la maximisation des processus de fixation de l’azote atmosphérique et d’exploration des ressources du sol.

Pour cela nous jouons tant sur la biodiversité temporelle (succession culturale des cultures de vente et de couverts d’interculture) que sur la biodiversité spatiale (bouquets variétaux, associations culturales, mosaïque de cultures et d’infrastructures agroécologiques) à l’échelle de la parcelle cultivée et à l’échelle supra parcellaire.

Les trois systèmes combinent un ensemble de leviers (contrôle génétique, biologique, cultural) à effets partiels, issus de travaux de recherche récents (variétés multi-résistantes aux maladies et aux insectes, maintenant un rendement correct en conditions d’azote réduit ou 0 N, compétitives ou tolérantes vis-à-vis des adventices, adaptées à l’AB ; produits de biocontrôle, SDP ; associations céréales-légumineuses, plantes de service, stratégies de push-pull, …) afin de tester la cohérence globale et les performances de ces systèmes potentiellement innovants à forts niveaux de rupture.

Les objectifs sont :

  • agro-environnementaux : augmenter la biodiversité sauvage et cultivée pour favoriser la régulation naturelle des bioagresseurs ; favoriser la combinaison de méthodes et de leviers permettant de maintenir les maladies, ravageurs et adventices à des niveaux économiquement acceptables ; ne pas impacter négativement l’environnement (eau, sol, air)
  • économiques : améliorer la robustesse économique du système en augmentant la diversité des cultures et des débouchés ; garantir un revenu satisfaisant au producteur via le maintien de la marge brute à l’échelle du système, en acceptant des baisses de rendement grâce à l’introduction dans la succession de cultures à plus forte valeur ajoutée (pomme de terre et légumes)
  • sociaux : réduire l’exposition des agriculteurs aux produits phytosanitaires et améliorer l’acceptabilité sociale des systèmes de cultures étudiés grâce à une forte réduction de l’usage des pesticides et des intrants chimiques, tout en s’assurant que le temps de travail lié à cette nouvelle gestion des systèmes demeure acceptable pour l’agriculteur
  • techniques : mettre à l’épreuve, affiner et valider des règles de décision et des protocoles d’observation pour l’aide au pilotage ou l’évaluation des systèmes
  • scientifiques (collaborations inter-équipes, inter-sites et inter-unités) : quantifier le niveau de contrôle biologique possible pour différents bioagresseurs ; mettre en évidence d’éventuelles corrélations positives ou négatives entre les patrons d’occurrence et d’abondance des bioagresseurs (approche multi-bioagresseurs - exemples : adventices/nématodes, bioagresseurs aériens/ telluriques, multi-pathogènes) ; évaluer l’effet de certains leviers agronomiques (par exemple travail du sol) sur les composantes du rendement, les réseaux trophiques d’arthropodes, la biodiversité, … ; comprendre la dynamique de l’azote dans le système, quantifier les flux, permettre une estimation des émissions d’azote vers l’environnement ; mettre à l’épreuve, en grandes parcelles cultivées, des leviers testés habituellement en microparcelles ; voir s’il existe des synergies/antagonismes entre ces leviers testés habituellement séparément.

 Les caractères novateurs sont de :

  • proposer des niveaux de rupture élevés grâce à l’utilisation de résultats de recherche récents sur des modes de gestion des bioagresseurs et sur les niveaux de tolérance variétale aux maladies
  • s’appuyer prioritairement sur la mobilisation de la biodiversité dans et autour des parcelles, tant au niveau aérien qu’au niveau des sols
  • mobiliser des compétences scientifiques fortes sur la caractérisation du système biophysique (écologie des interactions sol-plantes-bioagresseurs-auxiliaires) et la compréhension des mécanismes de régulation
  • diversifier les successions culturales classiques des bassins de production concernés avec des cultures peu implantées aujourd’hui mais adaptées à ces bassins et dont le débouché régional est garanti car ces cultures sont présentes dans d’autres bassins de la région.

Ces travaux bénéficient du soutien du métaprogramme INRAE METABIO, consortium PlAnHealth « Combinaison de leviers pour une gestion intégrée des santés des sols, des végétaux et des animaux dans des systèmes de production en AB » (2021-2022, co-piloté par IGEPP-MVI et URZ Guadeloupe)

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