Régulation de la recombinaison homeologue

Régulation de la recombinaison homeologue

Coordinateurs : Anne-Marie Chèvre, Mathieu Rousseau-Gueutin, Joseph Jahier, Olivier Coriton

Contacts : anne-marie.chevre@inrae.fr; mathieu.rousseau-gueutin@inrae.fr; olivier.coriton@inrae.fr

Recherche

Contexte et Enjeux

Une espèce allopolyploïde doit présenter une méiose régulière pour produire des gamètes équilibrés. Cela nécessite de prévenir l’appariement entre chromosomes homéologues (chromosomes issus des deux espèces diploïdes parentales), qui peut soit s’expliquer par la divergence entre les génomes parentaux ou par un contrôle génétique de l’appariement et de la recombinaison. Une meilleure compréhension de ce phénomène est nécessaire pour faciliter ou au contraire empêcher le transfert d’information génétique entre deux sous-génomes chez un polyploïde.

Chez le colza, nous avons pu montrer que le niveau d’appariement entre les sous-génomes A et chez des haploïdes de B. napus est majoritairement dû à un gène majeur (Prbn pour Pairing regulator in B. napus) (Jenczewski et al., 2003). Nous tirons partis des connaisances fondamentales sur ce processus afin de faciliter l’introduction de gènes d’intérêt, en particulier les gènes de résistance aux maladies chez les Brassica. Nous nous sommes aussi intéressés à l’impact de la localisation de gènes chez le colza sur leur potentiel transfert par flux de gènes dans le génome du radis (Raphanus raphanistrum).

Chez le blé, le gène Ph1 porté par le bras chromosomique 5BL constitue le composant majeur d'un système génétique inhibant l'appariement méiotique entre chromosomes homéologues. La mutation récessive ph1b qui est une délétion d'un segment chromosomique (70Mb) avec Ph1 induit une recombinaison entre les chromosomes du blé et ceux d'espèces apparentées portant le gène d'intérêt dans les hybrides interspécifiques ou entre les chromosomes homéologues du blé pour développer des lignées isohomoalléliques ou un stade intermédiaire.

Methodologie 

  • Cytogénétique classique basée sur l'hybridation interspécifique
  • Cytogénétique moléculaire (GISH, FISH)
  • Cartographie génétique
  • Tests de résistance aux maladies et analyses de la qualité des semences
  • Expériences aux champs

Principaux résultats

Chez le Colza

  • Introduction des gènes Rlm10 et Rlm6 de la moutarde noire et brune. Ces deux gènes confèrent de la résistance au phoma (Leptosphaeria maculans)
  • Détermination du flux de gènes entre le colza et le radis. L’objectif de cette étude était d’évaluer l’impact de la localisation d’un gène dans le colza sur son potentiel transfert par flux de gènes (via échange homéologue) vers le radis. A cette fin, nous avons développé des marqueurs. Ces travaux ont permis de montrer que certaines régions génomiques du colza pouvaient être plus facilement introduites dans le génome du radis.

Chez le blé  

La recombinaison homéologue permet d’induire des appariements méiotiques et donc des recombinaisons entre chromosomes du blé. La recombinaison a été exploitée dans le cadre de projets de recherche pour transférer des gènes codants pour des gluténines de haut poids moléculaire (HMW-GS), impliquées dans la qualité boulangère le transfert en double dose d’un gène de résistance à la rouille jaune, Yr17 sur les chromosomes 2A et 2D par recombinaison homéologue induite à l’aide de la mutation ph1 ainsi qu’un QTL de résistance à la Mosaique du Blé tendre dans le Blé dur.

Les sous-unités de gluténine de haut poids moléculaire (HMW-GS) influencent la qualité du blé panifiable. Nous avons rapporté le remplacement du locus Glu-A1 par le locus Glu-D1 codant pour les HMW-GS (2-12) dans une lignée isohomoallélique partielle d’une variété française de blé panifiable. Ainsi, nous avons exploité le nouveau chromosome transloqué 1AS.1AL-1DL dans le blé dur afin de développer des lignées de blé dur présentant de nouvelles propriétés. Le chromosome transloqué a d'abord été introduit dans le blé dur représente 84 Mb, il est apparu intéressant de le raccourcir par recombinaison homéologue induite par la mutation ph1c. Le segment 1DL interstitiel le plus court de 9,19 Mb ne pouvait pas être visualisé par hybridation génomique in situ (GISH). Un transfert aussi réduit, non réalisé jusqu'à présent, assure la régularité de l'appariement méiotique et permettra l'utilisation de ces sous-unités absentes dans les espèces de blé Triticum durum pour une exploitation directe en sélection.

La rouille jaune, causée par Puccinia striiformis f. sp. tritici, est l'une des premières maladies du blé. Les pertes de récoltes ont varié de 10 à 70 % et jusqu'à 100 % dans des conditions extrêmes. Quatre-vingt-deux gènes de résistance, appelés Yr, ont été identifiés. Parmi eux, Yr17, dérivé d'Aegilops ventricosa et situé sur le chromosome 2A, a été largement utilisé dans la sélection du blé. Cependant, il avait déjà été contourné. Par la recombinaison du chromosome 6Nv d'Ae. ventricosa portant Yr17 avec le chromosome 2D du blé en utilisant des lignées monosomiques, nous avons pu introduire Yr17 sur le chromosome 2D. Ensuite, des lignées portant le gène Yr17 sur 2A et 2D ont été générées. Ces lignées double dose Yr17 étaient totalement résistantes au stade plantule, tandis que celles portant le gène Yr17 uniquement sur 2A ou 2D présentaient des réactions de résistance intermédiaires.

La mosaïque des stries en fuseaux du blé et des céréales sont deux maladies extrêmement dommageables pour la culture du blé dur en France. Aucune variété résistante n’étant disponible à ce jour dans le catalogue, les agriculteurs sont contraints d’abandonner la culture du blé dur sur leurs parcelles où le virus est présent. La reconquête de la sole contaminée par les mosaïques pour la culture du blé dur passe donc par la recherche variétale afin de mettre à disposition une gamme variétale durablement résistante. Afin d’élargir la diversité génétique naturelle disponible, un QTL de résistance majeure à la mosaïque des stries en fuseau présent dans la majorité des variétés de blé tendre est en cours de transfère dans le blé dur en induisant une recombinaison homéologue.

Partenaires

  • INRAE, UMR GDEC (Génétique Diversité Ecophysiologie des Céréales), Clermont Ferrand, France (E. Paux et G. Branlard)
  • UMR BIOGER (Biologie et Gestion des Risques en agriculture), Thiverval‐Grignon, France (Claude de‐Vallavieille‐Pope)
  • Arvalis Institut du végétal, Baziège, France (D. Hourcade)
  • RAGT2n, Montbartier, France (Fréderic Minard)
  • Florimont-Desprez, Lectoure, France (M. Cochard)
  • INRAE SUPAGRO, Montpellier, France (J. David)

Financement (5 dernières années) 

  • CASDAR (2012-2015) : Création et caractérisation de génotypes de blé dur introgressés de gluténines du blé tendre afin de sécuriser une haute qualité technologique sous fumure azotée limitante. (P.I. J. Jahier)
  • CASDAR (2019-2023) : Pour des variétés de blé dur résistantes aux mosaïques (P.I. D. Hourcade)

Publications (5 dernières années)

  • Coriton. O, Jahier J, Leconte M, Huteau V, Trotoux G, Dedryver F, de-Vallavieille-Pope C. Double dose efficiency of yellow rust resistance gene Yr17 in bread wheat lines 2019b Plant Breeding https://doi.org/10.1111/pbr.12768
  • Coriton. O, Faye. A, Paux. E, Lemoine. J, Huteau. V, Branlard. G, Jahier. J. Development of 1AS.1AL-1DL durum wheat chromosome carrying Glu-D1a locus encoding high molecular weight glutenin subunits 2+12. Molecular Breeding March 2019a, 39:32